artéfact : là où le thé rencontre l’art
- Lorela Lohan
- Jul 10
- 20 min read
Updated: Jul 11
Entretien avec Fadel Imendjerioune, cofondateur d’artéfact
Cet entretien est disponible en français et anglais.
This interview is available in French and English.
Introduction
Le vendredi 13 juin, j’ai rencontré Fadel Imendjerioune, à l’occasion de ma venue à Paris pour le Tea Festival des 14 et 15 juin dans son salon de thé-galerie artéfact, niché dans le Marais à Paris. Le courant est passé tout de suite. Porté par la beauté des céramiques autour de nous, les infusions délicates que nous avons partagées, et une spontanéité rare, j’ai fini par insister pour qu’on fasse cette interview en personne dès le lendemain matin. Fadel a accepté avec une générosité et une simplicité qui résument bien l’esprit d’artéfact : un lieu vivant, curieux, accueillant, façonné par des rencontres et du sens.

1. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’ouvrir artéfact à Paris, et pourquoi avoir réuni le thé et l’art dans un même lieu ?
La création d’artéfact est née d’une envie naturelle de mêler deux passions : la mienne pour le thé et celle de la cofondatrice Kaleigh pour l’art.
Elle vient du monde de l’art contemporain, moi de l’univers du thé – j’ai travaillé longtemps chez Mariage Frères – et nous avons imaginé un lieu où nos deux univers pourraient se rencontrer. Nous voulions un espace hybride qui reflète cette double identité, avec par exemple une galerie d’art au-dessus du salon de thé, une sélection de livres d’art à consulter, etc. L’idée, dès le départ, était de créer un endroit où chaque élément a du sens, où tout est choisi avec soin et raconte une histoire – un artefact culturel en somme, au cœur de Paris. Nous avions aussi à cœur de proposer quelque chose de différent de ce qui existait : mélanger les cultures et mettre en avant des artistes et créateurs d’horizons variés, plutôt que de suivre les effets de mode du moment. Cette ouverture sur le monde, ce côté diversité, était un critère important pour nous. Quant à Paris, c’est la ville où nous vivions et un formidable terrain pour un projet culturel. Après de très belles années chez Mariage Frères, j’ai senti qu’il était temps de me renouveler et de lancer notre propre maison. Fin 2014, j’ai quitté Mariage Frères et, à peine deux mois plus tard, en décembre, nous ouvrions Artéfact dans le Marais. Tout est allé très vite, porté par l’enthousiasme de créer ce lieu unique réunissant le thé et l’art. Plus de 10 ans plus tard, je suis très heureux de voir le chemin accompli et surtout que nous avons beaucoup appris l'un de l'autre. Kaleigh réalise depuis 5 ans le sourcing avec moi et c'est vraiment un bonheur au quotidien car seul c'est vraiment compliqué de viser juste, deux avis valent toujours mieux qu'un.

2. Tu te souviens de ta première vraie rencontre avec le thé ? Celle qui a tout déclenché ?
Je n'ai pas une "première tasse" précise qui aurait tout changé. Ce que je peux dire, c'est que pendant mes nombreuses années chez Mariage Frères, j'ai vraiment développé et affiné ma passion pour le thé. À force de goûter des thés d'origines très variées, d'être plongé dans cette culture très riche, j'ai pris conscience de l'immense diversité de cet univers. C'est cette expérience qui m'a donné envie d'aller plus loin, de sortir des sentiers battus. Quand j'ai quitté Mariage Frères, je me sentais prêt à créer ma propre maison, avec l'envie forte de travailler directement avec les fermes et les producteurs et productrices, pour proposer uniquement des thés d'exception, en lien direct avec leur terroir d'origine.
3. Comment tu définirais ton approche du thé ? Plutôt sensible, culturelle, engagée ?
C'est une bonne question, il y a tellement de facettes... Le thé, pour moi, touche à tout : au sensoriel, au physique, au géographique, au culturel, au politique même.
Choisir un thé, travailler avec un producteur ou productrice plutôt qu'un.e autre, c'est déjà un engagement en soi. Qu'on en soit conscient ou pas, tout ce qu'on fait est politique. Mon approche, j'essaie de la garder naturelle, assez terre-à-terre. Et surtout, avec beaucoup d'humilité. On en apprend tous les jours, et c'est pour ça que je me méfie beaucoup de tout ce qui est "tea master", "docteur en thé", ces titres un peu pompeux. Je crois beaucoup en l'humain, mais personne ne se connaît vraiment soi-même... alors comment pourrait-on être maître de quelque chose ? Pour moi, ce sont des titres qu'on reçoit à la fin de sa vie, pas qu'on s'attribue. Donc j'avance avec sincérité, sans ego, dans une logique de partage et d'apprentissage continu. Mon approche est à la fois sensible, à l'écoute des saveurs et des gens ; culturelle, car le thé est ancré dans des histoires et des traditions ; et engagée, dans le sens où chaque choix de thé que je fais est porteur de sens et de valeurs.
4. Quelle est ta vision du monde du thé aujourd’hui, en France et à l’international ? Tu observes des évolutions ?
En France, j'ai l'impression qu'il se passe actuellement plus de choses en dehors de Paris qu'à Paris même. Plusieurs maisons de thé ont quitté la capitale pour s'installer en région. Je pense par exemple à Julien de Kancha, qui est parti s'installer en Bretagne. Moi, je trouve ça génial. Paris est saturé, et souvent pas dans le bon sens. Le thé se décentralise, et c'est très bien. On voit émerger des projets très créatifs un peu partout en France. Au niveau international, le monde du thé n'a jamais été aussi connecté. Les réseaux sociaux ont bouleversé la manière de sourcer et de découvrir. Aujourd'hui, je peux discuter directement avec un producteur au fin fond de Taïwan, suivre ses récoltes sur Instagram... Et on voit apparaître de nouveaux terroirs : le Malawi, le Colombie, le Brésil, le Rwanda, l'Iran, la France... Il y a une montée en gamme, une recherche de transparence, un vrai intérêt pour les thés d'origine et les savoir-faire artisanaux. Et ça, c'est hyper encourageant.
5. Comment tu choisis les thés que tu proposes ici ? Tu travailles directement avec des producteurs.trices ?
Absolument – chaque thé chez artéfact est sélectionné à la source. Nous sourçons nos thés directement auprès de producteurs talentueux aux quatre coins du monde (Malawi, Népal, Corée, Taïwan, Brésil, Japon, etc.) Je cherche en priorité des lots rares, de haute qualité, cultivés et transformés de façon artisanale et respectueuse de la nature. Mon approche, c’est vraiment d’aller chercher le thé à son origine. Souvent, cela passe par de longues recherches, des échanges en ligne, et dès que possible des voyages sur le terrain pour rencontrer les producteurs. Un autre aspect important pour moi, c’est de proposer des thés qui ont une histoire à raconter. J’évite de référencer des jardins ou des grands crus ultra-connus qu’on trouve déjà partout – même s’ils sont excellents – parce que j’estime que ces producteurs-là n’ont pas besoin de moi pour trouver des débouchés. Au contraire, je préfère dénicher des thés ou des terroirs moins connus, des méthodes de fabrication originales, bref des pépites que le grand public n’a pas encore découvertes.

Cela me permet de toujours surprendre la clientèle et de mettre en lumière de nouveaux talents du monde du thé. Cette recherche passe beaucoup par la rencontre humaine. Je suis de près le travail de certains producteurs pendant des années, avant même de collaborer avec eux. Par exemple, j’ai observé pendant six ans les expérimentations d’un jeune producteur taïwanais, Joshua Wang, spécialiste de la torréfaction des thés oolong, que j’ai découvert via des réseaux d’amateurs. Intrigué par la qualité de ses thés, j’ai décidé lors d’un voyage au Japon avec Kaleigh de faire un crochet de trois jours à Nantou (Taïwan) pour le rencontrer et voir son travail sur place. En plus d’être un producteur magnifique, c’est vraiment une personne magnifique. La connexion humaine a autant de poids que le produit lui-même. Depuis cette rencontre, on échange très régulièrement, presque tous les deux jours, et j'entretiens ce genre de relation de confiance avec beaucoup des producteurs.trices avec qui nous travaillons. Il ne s’agit pas juste d’acheter du thé, mais de construire un partenariat sur le long terme, où chacun apprend de l’autre. artéfact fonctionne un peu comme un réseau de passionnés : je n’hésite pas à mettre en contact mes clients avec les producteurs, à partager en toute transparence mes sources, car je vois ça comme une collaboration gagnant-gagnant plutôt que comme une transaction commerciale classique.

6. Qu’est-ce qui est non négociable pour toi dans le choix d’un thé — le goût, l’origine, les méthodes de culture, autre chose ?
Le goût, d’abord.
Il doit être juste, authentique, sans artifices. Ensuite, l’origine et les pratiques agricoles : je veux savoir que le thé est cultivé proprement, avec respect pour la nature et les gens. Même sans label bio, l’éthique de production est essentielle. Mais surtout, c’est le lien humain qui m’importe. Je veux connaître les personnes derrière le thé. Si je ne sens pas une personne ou si ses pratiques ne me conviennent pas, je ne travaille pas avec elle, même si son thé est bon. À l’inverse, j’adore soutenir les petits producteurs qui font les choses bien. Je veux aussi éviter les effets de mode : si un thé est déjà partout, je vais chercher ailleurs. Goût, éthique, authenticité : c’est la base.

7.artéfact, c’est aussi une vitrine pour des artistes et des artisans. Comment tu choisis les objets ou les créateurs avec qui tu travailles ? Et pour toi, quel rôle joue l’objet, la céramique notamment, dans l’expérience du thé ?
La sélection des artistes et artisans chez artéfact suit une philosophie très proche de celle du thé. Avec Kaleigh, qui s’occupe de la programmation artistique, nous cherchons à promouvoir des talents émergents ou sous-représentés, avec des univers diversifiés.
On essaie de ne pas montrer toujours les mêmes têtes d’affiche de l’art contemporain.

Kaleigh accorde une grande importance à la diversité culturelle et à la parité. On veut que la galerie reflète la richesse du monde artistique actuel. On choisit souvent en fonction de rencontres, de coups de cœur. Nous avons besoin de savoir avec qui nous travaillons, autant pour un objet que pour un thé. Tisser une relation de confiance est essentiel pour nous. Nous voulons comprendre la démarche de l’artiste, son intention. Bien sûr, la qualité de l’objet compte : une belle pièce, bien faite, durable. Mais le créateur derrière est tout aussi important. Et puis la céramique joue un rôle très particulier dans l’expérience du thé. Ce n’est pas juste un contenant, c’est un geste, une émotion, une matière qui dialogue avec ce que l’on boit. Une tasse faite main peut tout changer. Elle influence notre rapport au goût, à la température, à la gestuelle. J’adore quand un producteur de thé passe chez nous, tombe amoureux d’une pièce, et repart avec pour servir ses propres thés. Là je sais qu’un lien a été créé entre l’art et le thé. Et c’est exactement ce que Kaleigh et moi même cherchons à faire avec artéfact.

8. Tu crées aussi des thés parfumés. Quelle est ton approche dans leur création ? Créer un thé parfumé, c’est une alchimie très délicate.
Ce n’est pas seulement une question de goût, mais d’équilibre, de densité, de justesse. L’un des plus grands défis, c’est de trouver le bon dosage pour chaque ingrédient, de comprendre son volume, sa force, et sa façon de se comporter à l’infusion. Il faut que les éléments s’équilibrent et dialoguent avec le thé de base, sans l’écraser ni le masquer. Tous les mélanges sont réalisés ici, à l’étage d’artéfact, à partir d’ingrédients bruts, naturels, sans aucun arôme artificiel. On ne travaille qu’avec des produits de grande qualité : fleurs entières, agrumes, feuilles, épices, tout est sourcé avec le même soin que les thés eux-mêmes.
Ce que je trouve particulièrement inspirant, c’est de créer des thés parfumés sur mesure pour les artistes qu’on expose, ou pour des musiciens.ennes pour accompagner la sortie de leur nouvel album.
Chaque artiste a son univers, ses couleurs, son énergie. Je m’en inspire pour composer un mélange qui leur ressemble, une sorte de portrait gustatif. C’est une autre manière de prolonger leur travail, de lui donner une dimension sensorielle. On a aussi réalisé des thés pour des institutions, des maisons ou fondations qui voulaient une signature olfactive et gustative à leur image. C’est passionnant. Quand quelqu’un goûte un de ces mélanges et me dit : « Ça, c’est exactement cette exposition » ou « Ça me rappelle l’univers de cet artiste », je sais qu’on a réussi à transmettre quelque chose de vrai.
9. Quelle est la mission que tu portes avec artéfact ? Qu’est-ce que tu as envie de transmettre à travers ce lieu ?
artéfact est plus qu’un commerce, c’est un projet porté par une véritable mission. Depuis le début, on cherche à créer un pont entre le thé et l’art, entre la tradition et la modernité, entre les cultures du monde. Le salon de thé fait cohabiter des dégustations de grands crus et des performances artistiques ou des expositions contemporaines. À travers chaque événement qu’on organise (vernissages, ateliers, concerts intimistes…), on veut montrer que ces univers peuvent dialoguer et s’enrichir mutuellement. On a l’envie de dépoussiérer l’image classique du salon de thé en le transformant en espace culturel vivant. Mais il y a aussi l’envie de donner une résonance artistique à l’expérience du thé – de faire en sorte que boire un thé chez artéfact devienne un moment d’inspiration, d’échange, d’ouverture d’esprit. Ce que je souhaite transmettre avant tout, c’est la valeur humaine et culturelle qui se cache derrière chaque tasse de thé.
On voit artéfact comme une plateforme pour mettre en lumière les personnes passionnées : les producteurs.trices de thé, les artisans, les artistes – tous ceux sans qui ce lieu n’existerait pas.
Sa mission est de raconter leurs histoires et de créer du lien entre eux et le public. On tient énormément à la transparence : par exemple, on n’hésite pas à expliquer l’origine précise d’un thé, le nom de la famille qui le produit, la méthode employée, etc., afin que le client prenne conscience du travail et de la passion qu’il y a derrière ce qu’il boit. On a même déjà encouragé des clients à aller visiter directement des plantations de thé qu’on affectionne, ou à rencontrer des artistes qu’on expose, pour que l’expérience se prolonge au-delà d’artéfact. Transmettre, c’est aussi éduquer en douceur : j’aime quand un visiteur repart non seulement avec un délicieux thé, mais aussi avec une anecdote ou une connaissance nouvelle sur le thé ou l’art. En résumé, la mission d’artéfact, c’est de partager une passion – celle du thé artisanal et de la création artistique – et de montrer qu’ensemble, ces passions peuvent créer quelque chose de beau et de fédérateur.
10. Quand quelqu’un pousse la porte sans rien connaître au thé, comment l'accueillez-vous ? Tu commences par quoi ?
Avec enthousiasme et bienveillance ! Accueillir les novices fait partie du quotidien d’artéfact, et j’adore ça.
Quand une personne qui ne connaît rien au thé arrive, la première étape est de la mettre à l’aise et de la décomplexer.
Je lui pose quelques questions toutes simples pour cerner ses goûts : « Qu’est-ce que vous buvez d’habitude ? Café, infusion, rien du tout ? » « Plutôt des saveurs douces, fruitées, amères… ? » – ce genre de choses. À partir de là, je l’oriente vers un type de thé accessible qui pourrait lui plaire en première découverte, par exemple un thé blanc léger ou un oolong peu oxydé s’il aime le floral, ou au contraire un thé noir gourmand s’il a l’habitude du café. Le tout, c’est de rester pédagogue sans jargon et de garder un ton convivial. Chez artéfact, le service est très chaleureux et on est toujours heureux de répondre aux questions, même les plus basiques. Il n’y a vraiment aucune question bête, je prends le temps d’expliquer les différences entre un thé vert et un thé noir, comment infuser correctement, etc., avec des mots simples. Je tiens à ce que la découverte du thé se fasse de manière décontractée et interactive. Pas besoin d’être un expert pour apprécier : ici, personne ne vous snobera parce que vous ne savez pas ce qu’est un oolong ou un pu’er. Au contraire, je répète souvent qu’on reste humble et qu’on apprend tous les jours, quel que soit son niveau. Cette attitude bienveillante permet aux débutants de se sentir en confiance. Concrètement, je commence souvent par faire sentir deux ou trois thés très différents pour éveiller leur curiosité et voir leurs réactions. Ensuite, je prépare le thé choisi en expliquant brièvement d’où il vient, qui le produit, et comment le déguster. L’important pour moi, c’est que la personne reparte non seulement avec un thé qu’elle a aimé, mais aussi avec l’envie d’en apprendre plus. Si elle ressort en se disant « le thé, finalement c’est passionnant et varié, j’aimerais en découvrir d’autres », alors je considère que mon accueil est réussi. Et très souvent, ces néophytes reviennent, curieux d’élargir leurs horizons dans la bonne ambiance d’artéfact.

Conclusion
Ce moment passé avec Fadel m’a laissé le goût persistant d’une conversation sincère, profonde et chaleureuse. Chez artéfact, tout semble à sa place : le thé, les objets, les mots. Mais rien n’est figé. C’est un lieu qui respire, qui bouge avec les gens qui y passent et ceux qui le font vivre. Plus qu’une maison de thé, artéfact est un pont — entre les disciplines, les cultures, et surtout, entre les êtres. Merci Fadel, pour ce moment suspendu.
Artéfact: Where Tea Meets Art
Interview with Fadel Imendjerioune, co-founder of Artéfact
Introduction
On Friday, June 13, I met Fadel Imendjerioune, during my visit to Paris for the Tea Festival on June 14 and 15, in his tea gallery Artéfact, nestled in the heart of the Marais. We instantly clicked. Surrounded by beautiful ceramics and delicate teas, and carried by a rare spontaneity, I ended up insisting that we sit down for an in-person interview the very next morning. Fadel agreed with a generosity and simplicity that perfectly capture the spirit of Artéfact: a lively, curious, and welcoming space, shaped by encounters and meaning.
Lorela: What made you want to open Artéfact in Paris, and why bring tea and art together in the same space?
Fadel: The creation of Artéfact came from a natural desire to bring together two passions: mine for tea and Kaleigh’s, my co-founder, for art. She comes from the contemporary art world, I come from the world of tea—I worked for a long time at Mariage Frères—and we imagined a place where both our worlds could meet. We wanted a hybrid space that would reflect our dual identities, with, for example, an art gallery above the tea salon, a selection of art books to browse through, etc. From the very beginning, the idea was to create a place where every element had meaning, where everything was carefully chosen and told a story—a cultural artifact in the heart of Paris.
We also wanted to offer something different from what already existed: to mix cultures and highlight artists and creators from diverse backgrounds, rather than following the trends of the moment. This openness to the world, this emphasis on diversity, was a key part of our vision. As for Paris, it was the city we lived in and a great landscape for a cultural project. After many wonderful years at Mariage Frères, I felt it was time for something new. I left Mariage Frères at the end of 2014 and just two months later, in December, we opened Artéfact in the Marais. Everything happened very fast, driven by the excitement of creating this unique space that brings tea and art together.
Lorela: Do you remember your first real encounter with tea? The one that started it all?
Fadel: I don’t have a specific “first cup” that changed everything. What I can say is that during my six years at Mariage Frères, I truly developed and refined my passion for tea. Tasting teas from many different origins, being immersed in such a rich culture, I became aware of the immense diversity in the tea world. That experience pushed me to go further, to step off the beaten path. When I left Mariage Frères, I felt ready to create my own house, with a strong desire to work directly with farms and producers and offer only exceptional teas that are deeply connected to their origin.
Lorela: How would you describe your approach to tea? Would you say it's sensory, cultural, committed?
Fadel: That’s a good question—there are so many layers. Tea, for me, touches everything: the sensory, the physical, the geographical, the cultural, even the political. Choosing a tea, working with one producer over another, is already a form of commitment. Whether we realize it or not, everything we do is political.
My approach is to keep things natural and grounded. And above all, humble. I believe we’re always learning, every day. That’s why I’m wary of labels like “tea master” or “doctor of tea”—those titles feel premature, even a bit pretentious. I believe in people, but I also believe we don’t fully know ourselves… so how can we claim to master something else? For me, those titles are something you earn at the end of your life, not something you claim too soon. So I try to move forward with sincerity, without ego, in a spirit of continuous sharing and learning. My approach is sensitive—listening to flavors and to people; cultural—because tea is steeped in stories and traditions; and committed—because every tea I choose carries meaning and values.
Lorela: What’s your vision of the tea world today, in France and internationally? Have you noticed any changes?
Fadel: In France, I feel like more is happening outside of Paris than in it right now. Several tea houses have left the capital to set up in the regions. Julien from Kancha, for example, moved to Brittany. And I think it’s great. Paris is saturated—often not in the best way. Seeing tea decentralize is really positive. You can feel a lot of creative projects emerging throughout the country.
Internationally, the tea world has never been so connected. Social media has completely changed how we source and discover tea. Today, I can talk directly with a small farmer in Taiwan, follow their harvests on Instagram... We’re also seeing new terroirs gain recognition: Malawi, Colombia, Brazil, Rwanda... There’s a real shift toward higher quality, transparency, and a deeper interest in origin teas and artisanal know-how. That gives me a lot of hope.
Lorela: How do you select the teas you offer here? Do you work directly with producers?
Fadel: Absolutely—every tea at Artéfact is sourced directly. I work with small, talented producers all over the world: Japan, Nepal, Taiwan, Brazil, Malawi, and more. I look for rare, high-quality batches, grown and processed by hand with care and respect for nature. My approach is to go straight to the source. That often means long research, online exchanges, and whenever possible, traveling to meet the producers face-to-face.
What matters to me is that the teas have a story. I try to avoid referencing the ultra-famous gardens or grand crus that are already everywhere—even if they’re excellent—because those producers don’t need me to sell their tea. Instead, I prefer to find lesser-known terroirs, original techniques, true gems the public hasn’t yet discovered. It keeps my selection fresh and allows me to shine a light on new talents in the tea world.
Human connection plays a huge role too. I often follow a producer’s work for years before partnering with them. For example, I watched Joshua Wang in Taiwan for six years as he experimented with oolong roasting. When I finally traveled to Asia, I made a three-day detour to Nantou just to meet him and see his work firsthand. He’s not only a fantastic producer but also a fantastic person. That personal connection matters as much to me as the product itself. Since then, we’ve stayed in close contact—we text almost every other day. I try to build long-term relationships based on mutual trust. Artéfact works a bit like a passionate network: I even connect some of my clients with my producers. I’m completely transparent about my sources because I see it as a win-win collaboration—not a transactional relationship.
Lorela: What’s non-negotiable for you when choosing a tea—flavor, origin, farming methods, something else?
Fadel: Flavor comes first. A tea has to taste right—authentic, balanced, clean. No shortcuts. Then there’s the question of origin and how it’s grown. I need to know it comes from a farm that respects the land and the people. Whether or not it’s certified organic, what matters to me is the practice behind it.
But above all, it’s the human relationship that seals the deal. I need to know who’s behind the tea. If something feels off—if the person or their ethics don’t align—I won’t go ahead, no matter how good the tea is. On the flip side, I love supporting small, sincere producers doing great work. I also try to avoid overexposed teas. If something is already everywhere, I’d rather go find another treasure that no one’s talking about yet. That might seem a bit radical, but it’s how I keep the selection sharp and unique. For me, flavor, ethics, and authenticity are non-negotiable.
Lorela: Artéfact is also a showcase for artists and artisans. How do you choose the objects or creators you work with? And for you, what role does the object, particularly ceramics, play in the tea experience?
Fadel: The way we select artists and artisans at Artéfact is very close to how we approach tea. With Kaleigh, who manages our art programming, we try to spotlight emerging or underrepresented talents with diverse backgrounds. We deliberately avoid always showcasing the same familiar names in the contemporary art scene. Kaleigh places great importance on cultural diversity and gender balance. We want the gallery to reflect the richness of today’s artistic landscape.
We often choose artists and pieces based on encounters or creative crushes. I need to know who I’m working with, whether it’s an object or a tea. Building a relationship of trust is essential for me. I want to understand the artist’s process, their intent. Of course, the quality of the object matters—a beautiful, well-made, lasting piece—but the person behind it matters just as much.
Ceramics, in particular, play a very special role in the tea experience. It’s not just a vessel—it’s a gesture, an emotion, a material that interacts with what we’re drinking. A handmade cup can completely change everything. It shapes how we experience taste, temperature, even the ritual. I love it when a tea producer visits us, falls in love with a piece, and leaves with it to serve their own teas. That’s when I know a bridge has been created between tea and art. And that’s exactly what I try to build with Artéfact.
Lorela: You also create scented teas. What’s your approach when blending them?
Fadel: Creating a scented tea is a very delicate form of alchemy. It’s not just about flavor—it’s about balance, depth, and precision. One of the biggest challenges is finding the right dose for each ingredient, understanding its weight, strength, and how it infuses. Everything has to harmonize with the base tea, without overpowering or masking it.
All our blends are made upstairs at Artéfact, using raw, natural ingredients—no artificial flavors whatsoever. We only work with high-quality materials: whole flowers, citrus peel, herbs, spices—each one sourced with the same care as our teas.
What inspires me most is crafting custom blends for the artists we exhibit, or even for institutions. Every artist has their own world—their colors, their energy, their materials. I draw from that to create a tea that resembles them, a kind of aromatic portrait. It’s another way of extending their work into the sensory realm. We’ve also created signature blends for galleries, foundations, and other spaces that wanted a unique scent and flavor identity. It’s such a rewarding creative process.
When someone tastes one of those teas and says, “This is exactly the mood of the show” or “This reminds me of that artist’s work,” I know we’ve succeeded in transmitting something meaningful.
Lorela: What is the mission you carry with Artéfact? What do you want to share through this space?
Fadel: Artéfact is more than a business—it’s a project with a real mission. From the start, we wanted to create a bridge between tea and art, between tradition and modernity, between cultures. The tea room hosts grand cru tastings alongside contemporary art exhibitions and intimate concerts or workshops. Through every event we organize, we try to show how these worlds can speak to each other and enrich one another.
We also want to shine a light on the people behind what we share—producers, artisans, artists. I always try to tell their stories, share their names, their techniques, their values. We’ve even encouraged some of our clients to go visit the farms we work with, or to meet the artists whose work we show. We want the experience to extend beyond Artéfact. And sharing doesn’t have to be didactic—sometimes it’s enough for someone to leave with a cup of tea and a story.
What I hope to transmit, more than anything, is that every tea has a human and cultural value behind it. That’s the heart of Artéfact. It’s about creating and transmitting passion—for exceptional tea, and for creation in all its forms. Together, they build something beautiful and meaningful.
Lorela: When someone walks in without knowing anything about tea, how do you welcome them? Where do you start?
Fadel: With enthusiasm and kindness! Welcoming newcomers is part of everyday life at Artéfact, and I truly love it. When someone arrives without knowing anything about tea, the first step is to put them at ease and take away any sense of intimidation. I ask a few simple questions to understand their preferences: “What do you usually drink? Coffee? Herbal tea? Nothing at all?” “Do you prefer sweet flavors? Fruity? Bitter?” That kind of thing. Then I guide them toward a tea that’s approachable and enjoyable for a first experience—maybe a light white tea, a floral oolong, or a round, comforting black tea.
The key is to keep things simple and warm. At Artéfact, we love taking the time to answer any question—even the most basic ones. There’s no such thing as a silly question. I explain the difference between green and black tea, how to steep it properly, all in clear, accessible language.
The goal is to make discovering tea feel relaxed and interactive. You don’t need to be an expert to appreciate it—nobody here will look down on you if you don’t know what a wulong or a pu’er is. On the contrary, I always remind people that we’re all learning, all the time. That welcoming spirit helps people feel confident and curious.
Usually, I start by having them smell two or three teas—very different ones—to spark their curiosity. Then I prepare the tea they choose and talk about where it’s from, who made it, how to enjoy it. What matters most to me is that they leave not only with a tea they enjoyed, but with the desire to keep exploring. If they walk out thinking, “Wow, tea is way more diverse and interesting than I thought,” then I know I’ve done my part. And often, those people come back, excited to dive deeper into this world.
The time I spent with Fadel left me with the lingering sense of a sincere, profound, and generous conversation. At Artéfact, everything feels in its place—the tea, the objects, the words. And yet nothing is static. It’s a place that breathes and evolves with the people who pass through it and those who bring it to life. More than a tea house, Artéfact is a bridge—between disciplines, cultures, and above all, between people. Thank you, Fadel, for this suspended moment.
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